L’environnement des affaires devient de plus en plus complexe et les négociations que doivent conduire les entreprises sont de plus en plus difficiles. En parallèle, le métier des achats s’est professionnalisé, installant face aux commerciaux des acheteurs de mieux en mieux formés et de plus en plus exigeants. Alors face à cette nouvelle donne, comment réussir aujourd’hui ses négociations, même les plus difficiles?
Proposé par Isabelle Soubré.
« Un négociateur stratège au centre d’une équipe »
La négociation grands comptes et la négociation en ventes complexes ont-elles de réelles particularités ?
Oui, ces négociations ont des caractéristiques qu’il faut maîtriser pour pouvoir les aborder sereinement. Tout d’abord, les négociations grands comptes sont souvent à forts enjeux, de ce fait le négociateur subit des pressions extérieures plus fortes alors même que les processus de décision chez le client sont plus longs et construits autour de multiples interlocuteurs. Quant aux ventes complexes, même s’il ne s’agit pas forcément de négociations où les montants sont élevés, pour autant elles requièrent des compétences commerciales particulières, comme la capacité à vendre des solutions, à co-construire l’offre avec différents interlocuteurs et à déceler les besoins en amont par une bonne connaissance de l’organisation client.
En fait ces deux types de négociations se rejoignent sur la longueur du processus de vente, sur la complexité des processus de décision chez le client, et sur la capacité à mettre en place une équipe dans son entreprise capable de collaborer efficacement avec l’équipe client, en répondant aux besoins formulés par de multiples interlocuteurs.
Le commercial doit donc réussir à obtenir des résultats tout en animant une équipe, cela doit demander des compétences larges…
En effet, nous avons ici affaire à un négociateur capable de rester à la fois centré sur ses objectifs de performance, en particulier si le profit potentiel est élevé, et de bâtir des relations client solides et durables, à travers la mise en place de collaborations poussées entre les deux équipes, celle de son entreprise et celle du client.
C’est un négociateur stratège qui sait, grâce à son niveau d’engagement dans la relation, atteindre ses objectifs de résultats. Il sait aussi développer sa capacité d’influence par la mise en place d’un réseau d’alliances dans le compte client et par la mise en place des bons processus entre les deux équipes : un négociateur stratège au centre d’une équipe à l’écoute des besoins de l’équipe client.
Et l’acheteur, quel est son rôle dans l’équipe client ? La professionnalisation du métier des achats qui a eu lieu au cours des vingt dernières années, n’a-t-elle pas participé à accroître la difficulté de ce type de négociation ?
La difficulté croissante des négociations provient de multiples facteurs, comme un environnement marché plus complexe, un niveau d’incertitude plus élevé, des pressions internes plus fortes réclamant des résultats court terme, une marge de manœuvre plus limitée. Il est vrai aussi que la montée en puissance de la fonction Achat a rajouté un facteur supplémentaire à cette difficulté, et qui n’est pas des moindres. L’acheteur, mieux formé, plus aguerri, plus exigeant, demande aux fournisseurs un niveau de performance mesurable, tout en n’hésitant pas à les mettre en concurrence y compris à l’échelle internationale. Cependant, le commercial ne doit pas oublier que l’acheteur lui-même subit de très fortes pressions, car il ne peut pas se permettre de se tromper sur la sélection d’un fournisseur, les enjeux de qualité, de coût ou de délai sur les achats pouvant être considérables pour l’entreprise. L’acheteur aura pour objectif de rendre l’achat le plus simple possible en diminuant les contraintes, de façon à pouvoir mettre plus facilement les fournisseurs en concurrence et à réduire le risque. La complexité augmente le nombre de freins à l’achat, autant de barrières qui diminuent la liberté stratégique de l’acheteur.
Pourrait-on aller jusqu’à dire que la complexité est un atout pour le commercial ?
Un atout certainement, mais surtout une opportunité. Le commercial doit saisir la complexité de la vente comme une opportunité : la mise en place d’une équipe complète au service du client permet de créer des processus et des liens relationnels qui demeurent la meilleure garantie pour écarter le risque d’un duel acheteur-vendeur. Qui plus est, grâce à la complexité, le négociateur pourra élargir le champ de la négociation sur de multiples variables ; or plus le nombre de variables est important, plus les opportunités de conclure un accord sont nombreuses.
En bref, si le négociateur considère la complexité comme une opportunité stratégique, il lui suffira d’utiliser toute sa créativité pour proposer des solutions, et pour mettre en place les processus clés qui rendront son entreprise indispensable à l’organisation client. Dans ces conditions, nul doute que les négociations n’en seront que plus faciles à conduire…